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Fillon & parité


Il y avait, dans la rubrique "moi, ce que j’en dis", le texte intitulé "Rachida Dati & parité". C’était le premier épisode. Il y a une suite ! Le 2 février, sur France 2, le magazine “Des paroles et des actes”, animé par David Pujadas, reçoit François Fillon, premier ministre de la France.


Pujadas finit par aborder la question du pourcentage des femmes candidates. Fillon botte en touche : “...je ne suis pas le responsable de l’UMP...”


Vous pensez bien qu’autrement il se serait attaqué au problème depuis longtemps, mais il ne veut pas empiéter sur le territoire de son ami Copé, on est entre gens bien élevés…


Il précise toutefois : …”sur l’égalité hommes femmes on a fait beaucoup, on continue à faire…”


Poussé très mollement dans ses retranchements par une Martine Aubry consciente que sur ce terrain, même s’il fait mieux que l’UMP, le PS est loin d’être irréprochable, Fillon noie le poisson : …” on met des amendes, y a des pénalités, on a pris récemment une décision pour imposer un nombre de femmes plus important dans les conseils d’administration parce que c’est aussi une façon de faire entrer les choses," …


Après ce petit detour par les conseils d’administration, ça ne mange pas de pain, il revient sur le sujet :


“S’agissant de la formation politique qui est la mienne ça n’est pas tout à fait ma responsabilité, on essaye d’atteindre cet objectif, mais….”


Mais quoi ?


“…c’est très difficile Madame Aubry et vous le savez très bien…”


Il renvoie la balle dans le camp d’Aubry, toujours ça de gagné. Elle répond : “Je l’ai fait avec beaucoup de difficultés dans mon parti”.


Non, Martine, vous ne l’avez pas fait. Vous avez sans doute essayé, mais vous ne l’avez pas fait. Sans quoi votre parti n’aurait pas eu d’amendes à payer, et il en a eu…


Fillon continue sur sa lancée. On veut des explications ? On va en avoir. Attention, c’est du lourd ! Du très haut niveau ! Il ajoute :


…”quand on est une majorité sortante, y a beaucoup d’élus qui sont des élus de grande qualité qui ont le défaut d’être des hommes et qu’on ne peut pas mettre dehors simplement au nom de la parité y en a un à Paris, qui s’appelle Bernard Debré, c’est un homme de qualité, il a fait son travail, c’est une voix politique, on peut être d’accord avec lui ou ne pas être d’accord avec lui, mais personne ne peut nier que ce soit une personnalité politique, on ne va pas simplement le mettre dehors parce qu’il n’est pas une femme”.


Elle a mis du temps à sortir, mais on la tient, l’explication ! La parité, c’est trop, trop dur ! Et vous savez pourquoi ? Parce que les sièges sont occupés ! Comme les toilettes ! Faut d’abord attendre que la personne qui vous précède ait fini ! Elle veulent quand même pas s’asseoir sur des pauvres garçons ! Ça serait dégoûtant ! Et injuste ! Et l’injustice, il ne supporte pas, Fillon ! Ce pauvre Bernard Debré est un homme et on le lui reprocherait ? Fillon ne peut pas accepter une telle exclusion ! Il est un démocrate ! Un vrai ! Un humaniste ! Pour qui elles se prennent, à vouloir virer des mecs juste parce que ce sont des mecs ! ON VA QUAND MÊME PAS LES METTRE DEHORS, AU NOM DE LA PARITÉ, PARCE QU’ILS NE SONT PAS DES FEMMES ! Fillon ne saurait admettre une telle incongruité !


Pas seulement au nom de la parité, Monsieur Fillon. Au nom de la loi. La loi de la République. Le président qui vous a nommé adore fustiger les tricheurs quand ils sont petits, humbles, pauvres, minis-arnaqueurs spécialistes de la survie par temps de récession. Mais comment ça s’appelle, quand les élus, chef de gouvernement, chef de parti, se donnent la main pour maintenir une injustice qu’ils font semblant de dénoncer mais dont ils continuent à profiter éhontément ?


Les femmes ne veulent pas prendre la place des hommes, elles veulent prendre LA LEUR ! Celle qui leur revient de plein droit. Celle qu’on leur vole depuis toujours.


Ce sont les femmes qui sont dehors. Ce sont elles qui ne sont pas à leur place parce qu’elles sont des femmes. Et ce sont des hommes qui usurpent une place qui n’est pas la leur. Ça s’appelle tricher, Monsieur Fillon.


Et il faudrait attendre ? Mais attendre quoi ? Que les hommes en place ne soient plus là ? Qu’ils soient morts ?


Je comprends ! Ça va prendre du temps mais c’est imparable ! Au fur et à mesure qu’ils disparaissent, on pourra investir des femmes, jusqu’à la parité ! Ça prendra un siècle, ou deux, ou trois, mais on finira par y arriver ! Et on n’aura pas eu à brimer de pauvres hommes parce qu’ils ne sont pas des femmes.


Notons au passage que brimer quelqu’un parce qu’il n’est pas une femme, c’est inadmissible. Alors que brimer une femme parce qu’elle est une femme ne pose pas l’ombre d’un problème. Faut savoir naître, c’est tout !


Mais suivons le raisonnement. Si je comprends bien ce que dit Monsieur Fillon, celui-qui-essaye-mais-c’est-très-difficile, quand un sortant ne se représente pas, rien ne s’oppose alors à ce qu’on investisse une femme ! En avant la parité ! Avec un peu de bonne volonté, tout s’arrange !


Un exemple ? Oui, c’est plus vivant ! Il se trouve qu’on connaît, en plein Paris, une circonscription où le sortant ne se représente pas ! La 3ème ! Dans le 7ème arrondissement ! En plus c’est une sortante, Martine Aurillac, qui ne se représente pas, à l’insu de son plein gré sans doute ! On va pouvoir y aller ! En plus, pour la remplacer, il y a une candidate hypra motivée, prête à foncer ! Rachida Dati ! Ah oui, mais non ! Ça va pas être possible, là non plus ! Parce que tapi dans un coin, il y a, il y a, il y a… un homme ! Un pauvre malheureux à qui on ne doit pas reprocher dêtre un homme ! Un brave homme qui n’est pas du coin, mais y a pas de mal à ça, tout de même ! ! Il a vu de la lumière, il est monté, il a le droit ! Poussez vous les meufs !


Il s’appelle François. François Fillon. Le vrai, le grand, l’unique, le sincère, la main sur le coeur, le premier de nos ministres ! Celui qui-essaye-mais-c’est-difficile !


Il se foutrait de nous que ça ne m’étonnerait qu’à moitié….


Sur le plateau de France2, ce soir là, on est passé à autre chose. L’émission était finie. Martine Aubry, magnanime, glissera : “Bravo pour Lejaby”… Vraiment, Martine ? Bravo ?


iA !

20
Fév 12


Fillon & parité


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