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Excusez-moi de vous demander pardon

Il existe un symptôme tenace et récurrent qui étouffe apparemment de nombreuses anciennes victimes d’inceste (en tous cas, celles que je fréquente) et que j’ai nommé moi-même à défaut de connaître un mot déjà tout fait qui pourrait lui convenir : la j’encombrite.


La j’encombrite consiste à penser que tout ce que vous faites dans la vie dérange les autres.

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Si vous avez envie de commander un plat au restaurant, vous êtes sûre qu’il s’agit de celui qui demandera le plus de travail au cuisinier et vous vous en voulez déjà de lui imposer cette épreuve - alors, tout compte fait, vous prenez une salade. Si vous êtes à la caisse d’un magasin et qu’une file d’attente se forme derrière vous, c’est sans doute parce que vous payez beaucoup trop lentement - alors vous vous sentez obligée d’accélérer absurdement l’allure pour que personne ne perde de temps par votre faute. Si vous avez envie d’appeler une amie par téléphone, vous êtes sûre que votre coup de fil tombera au mauvais moment pour elle - alors, finalement, vous ne passez pas l’appel. Vous êtes l’archétype de la personne qui, ayant acheté un aspirateur et constatant qu’il possède un défaut de fabrication, le rapporte au service après-vente en s’excusant platement d’avoir eu l’idée si importune pour tout le monde de vouloir faire le ménage avec autre chose qu’un balai.


Le corollaire immédiat à ce sentiment de dérangement permanent est que toute attention que vous portent les autres vous semble nécessairement motivée par l’une des deux raisons suivantes. Ou bien la personne s’intéresse à vous parce qu’elle sait que vous êtes une ancienne victime d’inceste et qu’elle vous observe comme on étudie une curiosité biologique, un lémurien aux yeux globuleux dans un zoo ou une bactérie résistant aux très hautes pressions et très fortes températures. Ou bien elle s’intéresse à vous parce qu’elle a profondément pitié de l’échec humain total que vous représentez et qu’elle a décidé de faire de vous sa bonne action de la semaine. L’idée qu’elle puisse s’intéresser à vous simplement parce que vous êtes vous - une personne intéressante, drôle, aimable, en la compagnie de laquelle passer des moments agréables - vous semble à peu près aussi absurde que l’idée d’offrir un site internet à un poisson rouge. Si on s’intéresse à vous, c’est qu’il y a anguille sous roche, une raison malsaine cachée quelque part. Ce ne peut pas être parce que vous êtes quelqu’un de bien. La preuve : vous n’êtes pas quelqu’un de bien. Vous êtes un infime sous-individu de la classe des sous-entités, comme votre agresseur vous l’a si savamment et si régulièrement enfoncé dans le crâne pendant toutes ces années.


Du coup, la vie est très lourde et très pénible. replique montre Vous passez des heures à faire des choses pour les autres que les autres ne feraient jamais pour vous. Vous vous faites un devoir d’être disponible vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour tout le monde quand vous-même n’osez que très rarement demander un service à vos proches. Vous demandez pardon trente fois par jour. Le fameux réflexe du « excusez-moi » lancé à celui qui vient précisément de vous marcher sur le pied est un grand classique de votre vie quotidienne. Le summum du pompon du point culminant est atteint quand vous correspondez par e-mail avec une autre personne comme vous : « Excuse-moi de te déranger avec ce très long message / Je t’en prie, c’est moi qui t’avais trop parlé la dernière fois, je suis trop bavarde, il faut que tu m’excuses / Oh, de toutes façons, tu ne pourras jamais battre le niveau d’inutilité de tous les textes que je t’envoie / Je suis désolée, tu as sans doute mieux à faire que de m’écouter. » La j’encombrite épistolaire, c’est du grand art.


Bon, les filles, l’heure est grave. Combien de temps allons-nous encore supporter la j’encombrite, ce parasite implanté en nous, qui pousse dans nos bronches comme du lierre et nous empêche de respirer ? Qui a dit que nous n’étions pas intéressantes ? Qui a dit que nous n’en valions pas la peine ? Nos agresseurs. Franchement, est-ce leur opinion qui doit prévaloir sur celle de toutes les personnes qui nous adressent la parole tous les jours et qui, apparemment, ne sont toujours pas mortes d’ennui à nous écouter parler ? Si nous étions véritablement des sous-êtres inférieurs indignes de l’espèce humaine, nous ne vivrions pas avec cette sensation permanente de nous faire avoir, d’être à la merci des autres, de mener sans cesse des combats perdus d’avance pour ne pas être doublée dans la file d’attente, ne pas être oubliée par le vendeur du magasin, ne pas être méprisée par le collègue de bureau. C’est précisément sur cette sensation d’injustice qui nous fait du mal que nous devons compter pour trouver la motivation de changer.


Nous voyons les autres vivre leur vie pendant que replique montres nous perdons la nôtre à ne pas oser et, très honnêtement, regardons-nous bien en face dans la glace et avouons-nous la vérité, nous mourons d’envie d’être à leur place. Certes, un fois rentrées chez nous le soir, après nous être fait marcher dessus par nos collègues pendant toute la journée, nous essayons de nous convaincre que nous sommes faites pour qu’on nous marche dessus, qu’il y a celles et ceux qui sont fait-e-s pour marcher sur les autres, et celles et ceux qui sont fait-e-s pour servir de paillasson à leurs voisin-e-s. Mais ça, soyons honnêtes avec nous-mêmes, c’est ce que nous nous racontons pour faire passer la pilule de n’avoir pas encore su nous faire respecter. En réalité, nous voulons être respectées tout autant que les autres. C’est normal. Nous sommes des êtres humains tout autant que les autres.

Quand un être humain désire quelque chose, il y a deux options qu’il peut envisager. Ou bien il se donne les moyens d’obtenir ce qu’il souhaite. Ou bien il ravale son désir et gère la frustration. Un être humain équilibré doit savoir faire les deux : écouter son désir à chaque fois qu’il peut, et accepter la frustration lorsque les circonstances vont à l’encontre de sa volonté (et en particulier lorsque son désir nuit à un autre être humain). Le problème de la j’encombrite, hélas, c’est que nous n’avons intégré qu’un seul de ces deux comportements. Nous avons appris à nier nos désirs, systématiquement, même lorsque leur réalisation ne pose aucun problème à personne. Quand nous voulons quelque chose, au lieu de nous donner les moyens de réussir, nous mettons tout en oeuvre à l’intérieur de nous pour combattre notre désir, pour nous convaincre que nous ne voulons pas ce que nous voulons. Au moins, nous sommes passées maîtres dans l’art de la gestion de la frustration ! Mais de la même façon que certaines personnes sans gêne devraient apprendre à laisser un peu respirer les autres, nous devons apprendre à nous laisser respirer nous. Au risque de me faire accuser de fayotage par les autres intervenantes :-) je vous cite Isabelle Alonso : « Je pense donc je suis, c’est sans doute vrai, mais je désire donc j’existe, c’est encore plus vrai. »


Conclusion : nous répéter tous les matins que nous sommes quelqu’un de bien. Parce que c’est vrai. Ne pas avoir peur de dire aux proches de notre entourage : « Je voudrais que... » Parce que si jamais les proches ne veulent pas, ils ne se gêneront pas pour nous le dire, eux qui ne sont pas atteints de j’encombrite. Ne pas nous excuser des erreurs des autres. Si nous nous excusons de nos propres erreurs, c’est amplement suffisant. Faire attention à ce qu’on nous dit et prendre mentalement note de tous les encouragements reçus : le « C’est intéressant, comme idée... » d’une amie auprès de qui nous avons émis une hypothèse, le « Qu’est-ce que tu en penses ? » du collègue qui nous demande notre avis, le « Et toi, tu ne viens pas ? » du voisin qui s’inquiète de notre participation à la soirée organisée dans notre immeuble. Tous ces petits signes montrent bien que nous avons une place dans la tête des autres, que nous l’avons méritée, et qu’il n’y a pas lieu de supposer que leur intérêt pour nous est forcément motivé par les mauvaises raisons.


Quant à vous qui vivez hors du monde de la j’encombrite et pensez avec effarement : « Il y a quand même des gens qui se compliquent la vie ! » en lisant la liste de tous les symptômes de j’encombrite que je viens de citer, simplifiez-nous la tâche. Ne manquez pas de nous rappeler concrètement, preuve à l’appui, que même si vous vous en sortiez bien avant de nous avoir rencontrées, la vie est quand même plus sympa (intéressante/pimentée/surprenante... à vous de choisir) depuis que nous en faisons partie. Vous aussi vous avez tout à gagner du grand combat intergalactique contre la j’encombrite. A petite échelle : nous arrêterons de passer dix minutes à nous excuser à chaque fois que nous vous téléphonons. A plus large échelle : vous n’aurez pas à toujours faire le premier pas pour proposer quelque chose et ce sera parfois nous qui prendrons l’initiative d’aller vers vous.


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12
Juin 04


Excusez-moi de vous demander pardon


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